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EZ-LISTENING


Ce qu'il faut savoir ! Tout droit sorti de l'imagination créative et lucrative des spécialistes du marketing de la musique, le dernier courant en provenance de nos amis Brittons a fait son apparition, il se nommait : Ez-listening, prononcez AIZI c'est tellement mieux ! Alors que l'été dernier, les cigales chantaient et dansaient tout à loisirs les louanges des "conges-payes" apparaissait dans les bacs de votre disquaire préféré un rayon de "nouveautés" aux titres évocateurs : Ez- listening, cocktail music, Lounge music, HIFI, Low FI, autant de noms qui, somme toute, restent très mystérieux lorsque que l'on ne partage pas un certain goût pour les boites de nuits cosmopolites.
Venons-en au fait. Qu'est-ce que ce remue-ménage ? un concept ? peut-être ! une musique particulière ? de la cuisine musicale, sûrement !
Pour les plus jeunes qui lisent aujourd'hui ces lignes, ne cherchez pas ! On est loin de la décadence anarchique des punks de la fin des années soixante-dix (dont la techno, s'est un peu inspirée bien innocemment avec le hard-core) loin des mythes du heavy-metal et du grunge, loin de la new-wave des blafardes années 80. On ne se rapproche pas plus de la déferlente disco qui marquera par ses strass et sa frime. Par contre, c'est encore une sorte de renouveau qui puise ses racines dans la variété internationale des années 50 et 60 - un retour vers le futur -

BIG BUSINESS
10 ans après l'apparition et le succès imposés du support CD, les rééditions d'anciens titres font légions, les compilations en tous genres débordent de toutes parts. Jamais l'exploitation de la musique par les grosses compagnies n'a atteint un tel paroxysme à travers les campagnes publicitaires télévisées. Ce qu'il faut bien discerner dans l'industrie phonographique, c'est d'une part, les quatres Godzillas du métier, tels que EMI l'anglais, Sony le nippon, Philips le néerlandais (Polygram) et Warner l'américain qui se disputent le gros du marché à travers la distribution et la gestion de l'édition à l'international, d'autre part les indépendants qui récupèrent les miettes... tant bien que mal. En dehors de ces considérations économiques, l'arrivée des techniques du marketing frappe de plein fouet les métiers de la musique rendant prépondérante la place de la publicité, de la promotion et des relations publiques. Omnibulées par les fluctuations du marché, surtout en période de crise et ayant passé le coche de "l'underground" technoïde pour ne récupérer que la couche la plus commerciale du lot, en l'occurrence la "dance", les nouvelles stratégies semblent avoir été les suivantes. Après la vague froide de la culture techno envahissant tout, il faut recréer chez les consommateurs un nouveau concept, une nouvelle vision positive véhiculée par l'inconscient collectif de ce que furent les années 50, 60 et partiellement les années 70, autrement dit, les traces affectives des trente glorieuses en matière de consommation et de sens.

Les années "consommation"
Les 20 ans qui suivirent la seconde guerre mondiale engendrèrent des phénomènes sociaux sans précédent. L'état de guerre transforma radicalement le rôle de l'individu dans la société. Ainsi, les femmes qui participèrent activement à l'effort de deux guerres successives maintinrent leur statut en temps de paix. Après le tumulte et le sang de millions d'êtres humains, l'essence d'un nouvel optimisme fit son apparition donnant naissance à l'individualisme, à une certaine forme de prise de conscience, à la révolution sexuelle et à l'accomplissement spirituel qui caractérisa les années 60.
L'Europe avait été ravagée par les bombardements, il fallait pallier au plus pressé, la reconstruction. Les USA n'ayant pas autant souffert des ravages de la guerre en avaient profité pour dynamiser leur industrie et devenaient par la même la nation la plus forte sur le plan militaire et économique, avec toutes les responsabilités que cela implique. Comme on le sait, deux systèmes politiques emmergèrent et la grande Europe devint partiellement déchirée par le "rideau de fer" à travers deux blocs : l'Est et l'Ouest. La guerre devait aussi littéralement bouleverser les techniques et les sciences à travers ses besoins et eu pour effet de créer de nouveaux produits, entraînant de nouveaux besoins. Les USA, dopés par la migration de nombreux créateurs, scientifiques et intellectuels européens, allaient renforcer leur assise en terme de productivité libérale. Quant à l'Europe de l'ouest, elle devait par tous les moyens remettre de l'ordre, développer un extrême sens de l'innovation afin de palier son "retard". Les transports, telle que l'aéronautique, se démocratisèrent, l'industrie automobile s'enrichit de nouvelles lignes et de technologies de confort. L'électronique, les moyens de communication changèrent les habitudes de vie. Une civilisation de loisir pointait son nez. Tout cela entraîna une profonde mutation dans les désirs et les aspirations des nations démocratiques.
A partir de ces éléments, une effervescence sociale et idéologique donna le jour au sens du mot consommation. La crise, hormis un sens politique, n'avait pas les faveurs de la signification que l'on n'en retient aujourd'hui.

Mondes parallèles
Fluctuation des courants et des tendances, variation des économies, l'aboutissement de la vague Ez-listening à travers les compilations ou l'émergence de nouveaux groupes ou artistes (Milk Flowers Pop, Valérie Lemercier etc, etc) est la résurrection d'un nouveau discours à l'aube du 20e siècle. Pourquoi donc aujourd'hui se penche t'ont à nouveau sur la variété internationale des grands orchestres pseudo symphoniques des années 60 ? Sans y apporter une réponse définitive, on peut tenter de faire quelques propositions : la crise économique étant ce qu'elle est et que l'on ne peut tomber plus bas, faire des prévisions à la hausse suscite toujours des sursauts d'optimismes. A force de répéter que tout ira mieux demain, on finit par y croire ! A cela s'ajoute la déferlante Techno qui depuis 1990 environ laissait entrevoir un monde dur, cruel, froid et résistant face au système. L'easy-listening se dresse plutôt comme une alternative à la musique techno, kitch et humoristique, indolante et légère face à la rigueur des BPM au garde à vous. A l'instar des images fortes véhiculées par la techno-cyber-entreprise balayant la moindre parcelle de signification, s'oppose maintenant un passé qui doit s'adapter à sa nouvelle époque. Il fallait faire le vide, voilà des images d'Epinal qui ne demandent qu'à être consommées. Faute du contraire, les "leaders d'opinion" ayant un vécu culturel suffisant pour avoir du recul, sont les premiers à défricher dans les greniers d'archives, Ariel Wizman avec son émission hebdomadaire sur radio Nova : Cocktail Time, Gilles Verlant qui a signé le premier numéro de la rentrée 96 de "L'oeil du cyclone" sur Canal Plus, baptisé "Le manifeste Cocktail", sans compter évidement sur les chefs de produit de plus de trente ans des compagnies discographiques dont la seule vocation est de faire de l'argent avec ce qui coûte le moins.
On peut toujours crier au scandale par simple principe ou adhérer aux moindres idées quand elles vous manquent, mais ce que l'on ne peut ignorer, c'est que tous les éléments du puzzle "cocktail marketing" sont présents pour clore le siècle. De toute façon, cela durera le temps qu'il faudra et après ce sera encore autre chose, heureusement.

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